Pilotes Québec

Bonjour à toutes et à tous,

Je viens de me rendre compte à l'instant que mon forum préféré était à nouveau ouvert. Désolé, si je l'avais remarqué plus tôt je vous aurais tenu au courant des aléas de notre tour du monde. Même si maintenant cette magnifique aventure, autant humaine que technique, est terminée, je suis prêt à répondre aux questions que vous pourriez avoir sur ce projet.

Bons vols
Daniel

Félicitations Daniel pour votre belle aventure. Chacun de nous qui sont pilotes ont à un certain niveau le goût de partir comme ça et d'accomplir quelque chose qui sort de l'ordinaire. Votre aventure nous permet de voir la chance que nous avons de pouvoir piloter. Merci à vous.

Yves

Merci Yves. Oui voler est un privilège qui prend une saveur particulière lorsqu'il nous permet d'aller à la rencontre d'autres passionnés, pilotes ou non. J'ai beaucoup appris durant ces 6 années consacrées à cette aventure. J'essayerai de partager avec vous l'essentiel qui va bien au-delà de la technique et du pilotage, même si celui-ci est exigeant comme le montre cette vidéo:

Super la vidéo, on voit que le pilote a les bras assez occupés merci. Et tout ça avec le sourire.
Ce n'est pas du tout un avion manoeuvrable, certainement pas conforme aux normes de certification en la matière alors chapeau pour atterrir dans ces conditions.
--Luc

imaginez après 5 jour et 5 nuits seul à bord...

Au dire des 3 pilotes, c'est un avion qui a deux personnalités: assez facile à piloter en air calme mais difficile, même physiquement, lorsque c'était turbulent. Mais ce n'est pas un avion vicieux et instables comme peuvent l'être certains prototypes (comme le Voyager de Rutan), et les pilotes ont réussi à créer avec lui une relation de confiance qui était indispensable pour pouvoir se reposer et effectuer leurs turbo-siestes de 20' (une douzaine par 24 heures). Le problème avec cette envergure (72 mètres) et cette faible charge alaire (environ celle d'un delta) est que les virages doivent se faire avec une inclinaison d'environ 5°, 10° est le maximum à ne pas dépasser car il a été calculé qu'à une inclinaison de 14° environ le bout de l'aile extérieur va atteindre la VNE et l'intérieur va décrocher. Vous imaginez la suite... Pour cette raison les pilotes portaient des brassards vibrants qui les avertissaient dès que les 5° étaient dépassés. Les alarmes critiques faisaient également vibrer les deux brassards afin que les pilotes aient toujours 3 niveaux d'alarmes: visuelles, auditives et sensorielles.

Félicitations, merci pour la vidéo et informations.
Jacques

Deux années résumées en 9'...
Il existe un documentaire de 90' mais je ne pense pas qu'il va passer par chez vous.

Avez-vous des questions ?

Orion wrote:Avez-vous des questions ?

J'en ai une ou deux Daniel: Voici une question d'ordre financier... pour un projet comme le votre: Comment est-ce que les membres de l'équipe qui étaient à plein temps sur le projet étaient rémunérés (en fait, par qui?). Je présume que les commenditaires y étaient pour beaucoup? Mais est-ce suffisant?

Est-ce qu'il y aura une suite? Une fois qu'on fait quelque chose d'extraordinaire comme vous l'avez fait, il doit sûrement y avoir d'autres idées de projet? Il me semble qu'il serait difficile de retourner à une vie dite "normale", c'est-à-dire retourner au boulot habituel et mener une vie tranquille.

Merci

Yves

Pour répondre en partie à votre question concernant le financement de Solar Impulse, je vous conseille cet excellent article. A part quelques exceptions nous étions tous engagés par Solar Impulse, la plupart uniquement durant les missions.

Pour la suite, Bertrand se consacre dorénavant à l'Alliance mondiale pour les technologies propres et André aux drones.

En ce qui me concerne, je travaille sur un nouveau projet (dont je vous parlerai l'année prochaine) et qui devrait en 2018/19 m'amener à nouveau autour du monde (en passant par chez vous;-). Vous avez raison, lorsqu'on a goûté à ce genre de vie, on peut s'en passer difficilement...

N'hésitez-pas à me poser toutes les questions qui vous viennent à l'esprit. J'essayerai d'y répondre au mieux.

J'ai enfin eu le temps de voir cette vidéo, elle est super. Pleine d'émotions et des images magnifiques comme au dessus des pyramides.
Il y a un gars dans l'équipe que je connais c'est Marcus Basien.
Un autre projet autour du monde? J'ai bien hâte de savoir que quoi il retourne.
Ma question: qu'est-ce que tu fais sur ces projets?
--Luc

Marcus avait un rôle important et pas facile... En ce qui me concerne, d'une part je faisais partie de la ground crew qui était responsable de l'avion au sol dès qu'il avait atterri et jusqu'à qu'il redécolle. Donc parfois je tenais le handling mast au décollage et faisait le biker ou le runner pour catcher l'avion à l'atterrissage, montait et démontait notre hangar mobile lorsque aucune hangar ou tente n'était disponible, surveillait notre avion (qui était gardé jour et nuit) et le présentait aux visiteurs (très nombreux). D'autre part j'étais responsable de l'équipement des pilotes, c'est à dire de tout ce dont ils avaient besoin pour voler : oxygène, vêtements, nourriture, boissons, etc... et tout ce qu'ils auraient pu avoir besoin en cas de problème: parachute, équipements de survie, etc... Un job très proche des pilotes qui mélangeait technique et relationnel.

Pour ce qui est de mon nouveau projet, aéronautique également mais pas électrique et beaucoup moins important que SI, j'en suis l'initiateur et le responsable. Je vous en reparlerai en temps voulu.

Orion wrote: En ce qui me concerne, je travaille sur un nouveau projet (dont je vous parlerai l'année prochaine) et qui devrait en 2018/19 m'amener à nouveau autour du monde (en passant par chez vous;-). Vous avez raison, lorsqu'on a goûté à ce genre de vie, on peut s'en passer difficilement...

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Allô Daniel,

Bon sang, quel chemin de parcouru depuis notre dernière rencontre en Suisse. Tu m'avais dit que tu avais laissé ton travail pour entrer dans l'aventure de SI et que cette décision était sûrement la plus folle que tu avais prise de toute ta vie. Tu savais aussi qu'il ne fallait pas laisser passer l'opportunité de vivre cette incroyable aventure parce qu'elle ne se représenterait pas une deuxième fois. Et bien, tu vois, il y a des décisions qu'on prend dans la vie qui nous amènent bien au-delà de ce qu'on aurait pu imaginer. Tu es maintenant reparti pour un autre tour du monde et je m'en réjouis pour toi.

J'ai suivi plusieurs atterrissages de SI et ça me faisait chaque fois sourire de te voir courir (ou pédaler) après ce bel oiseau J'imagine que c'était chaque fois une belle sensation de le voir atterrir.

Au plaisir de te revoir

Martine

Eh oui, dans la vie comme en vol, le plus difficile est de prendre la bonne décision et souvent celle-ci ne se prend pas avec son cerveau mais avec ses tripes. Au plaisir de te revoir par chez nous Martine.

J'en ai prise deux comme ça dans le courant de ma vie. La première, je me suis retrouvée au Canada co-propriétaire d'une ferme laitière et la deuxième, propriétaire d'un hélico.

Je reviens fin juin pour les 80 ans de ma maman

Martine

Ce qui m'impressionne aussi, c'est le côté gestion de "l'humain". C'est sûr qu'il y a toute une logistique autour de l'avion mais tous ces gens qui sont là autour, il faut aussi s'en occuper. Gérer l'hébergement, les repas, le transport. Gérer les emplois du temps, ceux qui sont à plein temps, ceux qui sont à mi-temps. Ceux qui sont partis et ceux qui sont entrés dans l'aventure en cours de route. C'est comme une petite fourmilière qu'il faut déplacer de pays en pays.

Comment est-ce que ça se passait ?

Martine

C'est une bonne question et comme pour toute expédition c'est l'élément clé. En fait Solar Impulse a été un triple défi: technique, humain et logistique.

Pour le logement et les déplacements, deux personnes avaient cette tâche d'autant plus difficile qu'elles devaient réserver un hôtel (c'était plus simple et plus sympathique d'être tous dans le même) pour environ 50 personnes sans savoir vraiment quand on arriverait et combien de temps on resterait. Imaginez les conséquences d'un report de départ pour les hotels au départ comme à l'arrivée. Un vrai challenge qui a été résolu la plupart du temps en expliquant notre projet aux managers des hotels qui très vite y adhéraient et le prenaient aussi comme un challenge en devenant des partenaires au lieu de simples prestataires de service. Mais ça demandait de la part de ces deux filles de grandes qualités de communication d'autant plus qu'il fallait s'adapter aux différentes cultures des pays visités. On ne dialogue pas en Inde, en Chine ou au Japon comme on le fait aux USA ou en Europe.

Pour la nourriture, (encore plus important que le logement après les expériences faites au Maroc en 2012 (ou toute l'équipe avait été malade y compris les pilotes) nous sommes arrivés à la conclusion qu'il fallait que nous fassions notre propre cuisine. Nous avons donc développé une cuisine mobile, transportable facilement, et avions une équipe de 3 cuisinières/ers. Non seulement cette solution était financièrement plus économique mais cela permettait à toute l'équipe de se retrouver plusieurs fois par jour au moment des repas. Et on sait bien que dans toute entreprise c'est à la machine à café et à la cantine qu'on en apprend le plus (et pas toujours dans les réunions formelles). Les cuisinières nous faisaient découvrir les produit locaux mais à la sauce suisse que nos estomacs pouvaient apprécier. Pour la petite histoire, après chaque coup dur, nous nous retrouvions autour d'une fondue...

C'est impressionnant ce qu'a accompli Solar Impulse. Son équipe vient de se hisser au rang des Lindberg et de tous ces autres pionniers qui ont marqué l'histoire de l'aviation et des communications. Un immense BRAVO! pour la réussite de cette aventure qui stimule certainement l'avènement d'une Terre plus propre.
J'avais eu l'honneur de rencontrer Monsieur Picard à Gatineau , il y a bien une quinzaine d'années, alors que j'étais le porte-parole du festival de Montgolfières. Il accumulait déjà les records dans le domaine de l'aérostation.
Merci Orion de nous avoir tenu au courant de cet événement et de sa suite. Et comme on dit familièrement ici, bravo à toi aussi et à tous les gens concernés pour votre beau travail...
Gaston

Merci Gaston, c'est un plaisir de partager avec vous ce que j'ai pu apprendre durant ces 6 années passées au sein de cette équipe et au contact de personnes exceptionnelles. Car un des messages que souhaitent faire passer Bertrand et André pourrait se résumer ainsi : osons nos rêves ! - retrouvons l'esprit pionnier de nos parents - osons sortir de notre zone de confort et explorer l'inconnu. Le développement de l'efficience énergétique et des énergies renouvelables offrent un terrain d'exploration fabuleux, de nouveaux marchés et beaucoup de postes de travail. Solar Impulse n'est pas un projet écologique au sens stricte de ce terme. Si on calcule le bilan carbone de ce tour du monde et toutes les personnes de l'équipe qui ont dû voyager en avion de ligne ou en cargo avec notre hangar mobile pour que ce tour du monde soit possible, celui-ci est bien sûr négatif. Mais fallait-il attendre que des avions solaires de 50 places soient disponibles ? - Cet avion capable de voler perpétuellement est avant tout un démonstrateur technologique, un laboratoire volant de ce que l'énergie solaire est capable de réaliser, d'inspirer un maximum de personnes qui vont prendre le relais. Solar Impulse est un projet "éco-logique", "éco" venant de "économie".

Oui Orion, c'est aussi ce que je crois. Il y a toujours des pertes autour des nouvelles inventions comme celle-là, qui une fois abouties et standardisées, serviront à économiser de la matière et du temps. On ne fait pas d'omelette sans casser des oeufs. Je fonde beaucoup d'espoir dans le solaire. Déjà, ma "résidence forestière" est complètement autonome avec l'énergie renouvelable. Une bien petite goutte d'eau dans l'océan cependant. Mais la science rendant de plus en plus efficace ce type de système, je crois qu'on peut y arriver, même si mon empreinte écologique ne peut pas vraiment être donnée en exemple en ce moment.