Contrariété suprême - Virage de base en finale
Posted: Mon 30 Sep, 2013 23:00
Les quatre premiers paragraphes représentent une mise en contexte. Vous n'avez pas besoin de les lire...
Dans le cadre d'un fil de discussion récent "Hélio", j'ai eu la chance de détailler une explication sur le risque qui peut être associé au virage de base en finale, particulièrement dans le cas où un vent traversier (par rapport à la piste) donne une illusion de plus grande vitesse en base (vent dans le dos pendant la base). Je la reproduit ici en version enrichie et améliorée.
Ce sujet me semblait avoir été très bien couverts par un article de AvWeb. Je n'ai malheureusement pas été en mesure de retrouver. Par la suite, la COPA avait elle aussi publié une mise en garde mais il manquait des bouts par rapport à AvWeb. Dans le fil de discussions sur les Hélios, un document de Transport Canada présentait un élément qui, de mémoire, manquait à l'explication de AvWeb. Voici donc des circonstances qui peuvent vous faire rapidement passer dans un autre monde. Comme le disait Monsieur Ledoux, enquêteur au BST, il arrive parfois que "la vie soit vraiment très belle" jusqu'à quelques secondes avant qu'elle ne devienne, on l'espère, éternelle.
L'idée de partager ce texte dans une chronique, c'est aussi parce que c'est un sujet sur lequel ma propre formation était défaillante. Depuis que j'en ai pris conscience, j'ai réalisé que bien d'autres pilotes n'en saisissaient pas tous les risques. En fait, bien des instructeurs aussi (Même une organisation très très très crédible est complètement perdue dans ses explications - j'en fait le sujet d'un quiz dans une petite chronique dans quelques jours). Évidemment, on peut dire que si vous respectez toujours parfaitement toutes les consignes qu'on vous a inculquées pendant votre formation, vous n'aurez pas de problème. Selon moi, c'est nettement insuffisant : À moins d'avoir été spécifiquement prévenus sur les circonstances favorables au piège, les consignes ne sont tout simplement pas suffisantes. Le piège est vraiment trop accessible à une complaisance qui peut très bien ne pas être reconnue comme telle.
Dernière mention avant d'entrer dans le vif du sujet : Comme Louis le supposait dans le fil sur les Hélios, les circonstances de ce virage sont très proches (mais pas identiques) à celles du "Moose Stall", qu'on pourrait aussi traduire au Québec par "le décrochage du béluga", ou encore, "le décrochage du rorqual commun" ou même, par "le décrochage du cachalot". Je vais garder la dénomination du Moose Stall puisqu'elle existe déjà et même si vous retrouvez ici des explications apparentées à celles du Moose Stall (pas toutes), je compte en faire le sujet d'une chronique distincte, aussi pour lui faire de la pub : Ce décrochage, je crois que c'est deux pilotes que je connaissais qu'il a emporté. Louis en connais aussi et comme il le faisait remarquer, ce sont souvent des pilotes très expérimentés qui en sont victimes. Je vous promet aussi une petite chronique sur le décrochage asymétrique parce que finalement, on lit vraiment n'importe quoi...
C'est ici que ça commence : Virage de base en finale - le Piège
1) Un bon vent dans le dos en étape de base peut vous donner l'impression que vous allez vite par rapport au sol et vous amener à réduire votre vitesse air (si vous ne regardez pas votre anémomètre qui vous indique justement cette vitesse)
J'en profite pour ouvrir une autre parenthèse pour mettre en garde ceux qui voudraient atterrir en avion avec la vitesse GPS pour indicateur de vitesse (vitesse sol) - c'est courir au suicide... Posez la question si vous n'êtes pas sûr de savoir pourquoi... (et ça vaut même si vous lisez la vitesse sur le simili anémomètre du tableau de bord de votre GPS Garmin ! ).
2) Comme la vitesse sol va être plus élevée à cause du vent dans le dos (si vous avez conservé une "vitesse air" adéquate), l'étape de base passe plus vite : C'est facile de dépasser l'axe de piste.
3) En fin de base, on est déjà moins haut qu'en début de base. Si on ne regarde pas assez son anémomètre qui indique la vitesse de l'avion dans les airs, l'illusion de vitesse au sol devient encore plus importante, ce qui peut porter un pilote pas attentif à laisser sa "vitesse air" diminuer encore.
Ici, il faut rappeler qu'une diminution de la vitesse implique une augmentation de l'angle d'attaque : C'est facile à visualiser : un avion qui vole lentement s'enfonce dans la masse d'air : Le vent relatif va venir de "plus bas" par rapport à un avion en croisière et qui va voir un vent relatif presque parallèle avec la corde de l'aile. En ralentissant, l'angle d'attaque augmente (et un angle d'attaque qui augmente, c'est un angle d'attaque qui se rapproche de l'angle de décrochage...)
4) Le pilote s'apprête à faire un virage. On sait qu'en virage, la vitesse de l'aile intérieure diminue, ce qui implique une augmentation de l'angle d'attaque pour l'aile à l'intérieur du virage (plus de détails à venir dans la chronique sur les décrochages asymétriques).
5) Comme le pilote se trouve déjà bas pour entreprendre un virage à grande inclinaison qui pourrait être requis pour rejoindre l'axe de la piste, il peut être tenté de "tricher", de forcer le virage avec le palonnier. Ceci va ralentir encore davantage l'aile à l'intérieur du virage et donc augmenter encore l'angle d'attaque sur cette aile. Si l'aile intérieure n'est pas encore décrochée, ces augmentations successives de l'angle d'attaque sur cette aile se rapprochent dangereusement de l'angle de décrochage. Pendant ce temps, même si l'angle d'attaque du vent relatif se rapprochait aussi tranquillement de l'angle de décrochage de l'aile extérieure, ce mouvement de palonnier vers l'intérieur va accélérer l'aile extérieur et donc, réduire l'angle d'attaque sur cette aile (l'éloignant d'une situation de décrochage).
6) Ce mouvement de palonnier pour forcer le virage, si il ne s'accompagne pas d'un mouvement d'ailerons correspondant, ça fait un dérapage. Le pilote ne voudra pas suivre avec l'aileron parce qu'il va avoir peur de faire un virage à grande inclinaison à faible altitude. Bon, à ce stade, l'aile gauche vient de ralentir alors que l'aile droite vient d'accélérer (réduction de l'angle d'attaque sur l'aile extérieure (droite) mais c'est un changement de vitesse dans une période relativement courte (le temps du mouvement de palonnier). Ce relativement bref mouvement peut déjà être fatal mais si il ne l'est pas, le pilote peut encore très facilement se mettre dans une situation contrariante.
7) Ici, l'avion, si il n'est pas déjà en contact avec le sol, est établit dans un virage. Le virage n'est pas coordonné mais, au delà du mouvement de lacet induit pas le palonnier, l'avion va tout de même continuer à virer vers la finale. En virage donc, l'aile intérieure va moins vite que l'aile extérieure, ce qui continue à maintenir un angle d'attaque plus important sur l'aile intérieure que sur l'aile extérieure.
8) Au delà de la vitesse plus basse de l'aile intérieure (gauche) et de la vitesse plus élevée de l'aile extérieure (droite), le mouvement latéral de l'avion associé au dérapage va lui-même favoriser une augmentation de la portance sur l'aile extérieure (la plus exposée au vent dans cette situation de dérapage).
9) Virage légèrement ou fortement dérapé mais en virage tout de même et l'avion va être incliné dans le sens du virage (même si il n'est pas suffisamment incliné pour produire un virage coordonné). À partir du moment où l'avion est en virage, on augmente le facteur de charge. Augmenter le facteur de charge, ça se traduit par une augmentation de l'angle d'attaque sur les ailes. Vous voyez bien qu'on aide pas notre cas mais bon, je crois qu'on peut dire que c'est intrinsèque aux virages (à moins de faire des virages en g négatifs mais là, je ne connais rien à la voltige).
10) Comme on vient de ralentir l'aile gauche, elle perd de la portance pendant que l'aile droite en gagne. L'aile gauche peut s'affaisser (si elle ne décroche pas carrément). L'aile droite (extérieure) peut aussi monter du fait la portance supplémentaire induite par cette accélération ou de la vitesse plus élevée issue de l'accélération et aussi, du mouvement de dérapage latéral vers l'extérieur du virage qui l'expose à un plus grand écoulement d'air (je suis persuadé qu'en plus, un dérapage pour nos avions dépourvus de winglets doit généralement entraîner une réduction de la turbulence de sillage au bout de l'aile extérieure et donc, une plus grande portance).
11) Pour compenser ce léger affaissement de l'aile gauche (l'aile à l'intérieur du virage) ou soulèvement de l'aile droite (l'aile à l'extérieur du virage), le pilote peut être tenté de donner de l'aileron à droite pour éviter de laisser l'avion s'incliner (Si il n'a pas déjà fait décroché son aile intérieure au virage avec le mouvement du palonnier). Il peut aussi être tenter de tirer un peu sur le manche face à cet affaissement intempestif.
12) En donnant du palonnier à droite, il abaisse l'aileron gauche et augmente ainsi l'angle d'attaque. En même temps, il RELÈVE l'aileron droit et réduit l'angle d'attaque de l'aile droite qui va s'en trouvée encore mieux accrochée. Si il tire sur le manche, il augmente encore plus l'angle d'attaque.
En fait, là, tout est déjà joué : Ce dernier coup d'aileron, c'est le coup de grâce. Presque tous les facteurs concordent pour faire décrocher l'aile gauche tout en favorisant le ré-accrochage de l'aile droite. L'avion peut très brutalement s'incliner, voir même se retourner, avec vraiment très peu d'espoir de le remettre à l'endroit, surtout avec l'effet de surprise de voir cette aile intérieure se dérober brutalement à 500 pieds du sol.
Bon, une autre petite nuance : Si on vire en glissade et qu'on tire assez fort, c'est l'aile extérieure qui va décrocher. Ça, c'est beaucoup moins grave parce que si ça ce produit, ce décrochage de l'aile extérieur va naturellement amener l'avion à sortir du virage - les ailes vont revenir naturellement à l'horizontal. Ça laisse du temps pour réagir, pour soulager le manche tout en ramenant les ailerons au neutre, pour faire une remise des gaz au besoin. Il faut toutefois réagir parce qu'autrement, le décrochage de l'aile extérieure (haute) peut se poursuivre au delà de la situation horizontale dans laquelle son décrochage l'aura d'abord ramenée. Le dérapage ne laisse aucune de ces chances.
Ma recommandation : Si vous n'êtes pas à l'aise dans les glissades, qu'elles soient vers l'avant ou en virage, faites vous aider par un instructeur. C'est la partie la plus le fun du pilotage. Si vous tenez absolument à pratiquer des glissades seuls sans en avoir l'habitude, rappelez vous toujours d'abaisser le nez et de garder de la vitesse et de l'altitude : En glissade, le fuselage est mis en travers de l'écoulement de l'air. Sur bien des avions, ça a l'effet d'un frein vraiment efficace (et c'est pour ça que c'est utile pour perdre de l'altitude rapidement). Un des objectifs de la glissade, c'est de vous permettre de perdre de l'altitude. Ça permet aussi d'atterrir vent de travers avec doigté, et de rejoindre avec précision l'axe de la piste si vous êtes un peu décalé (accessoirement, ça permet aussi de ralentir au dessus de la piste avant le toucher des roues mais là, c'est un peu "agressif" comme pilotage...).
Pierre, qui remercie tous ceux qui ont contribué, et tous ceux qui vont encore contribuer à cette compréhension.
Merci d'enrichir ce texte de vos commentaires (ou de vos questions). Il m'arrive de dire des niaiseries et je n'en fait pas de complexes. La confrontation des idées, ça les enrichies, ça les rends plus fortes et ça favorise la compréhension de chacun. Aussi, assurez-vous de comprendre, pas seulement d'enregistrer une consigne. Je ne suis pas instructeur (pas encore en tout cas). Ce texte, c'est une plate-forme pour comprendre.
Une importante mise en garde : Cette séquence, ça ne représente pas une chaîne d’événements où tous les éléments sont requis pour entraîner un accident. Il peut manquer plusieurs éléments (dont le coup de grâce avec les ailerons) et le résultat peut être tout aussi contrariant (moins probable mais tout aussi contrariant). Par contre, si tous les éléments sont là, vous êtes à peu près sûr d'avoir déjà un pied dans le vol gratuit à perpétuité.
Dans le cadre d'un fil de discussion récent "Hélio", j'ai eu la chance de détailler une explication sur le risque qui peut être associé au virage de base en finale, particulièrement dans le cas où un vent traversier (par rapport à la piste) donne une illusion de plus grande vitesse en base (vent dans le dos pendant la base). Je la reproduit ici en version enrichie et améliorée.
Ce sujet me semblait avoir été très bien couverts par un article de AvWeb. Je n'ai malheureusement pas été en mesure de retrouver. Par la suite, la COPA avait elle aussi publié une mise en garde mais il manquait des bouts par rapport à AvWeb. Dans le fil de discussions sur les Hélios, un document de Transport Canada présentait un élément qui, de mémoire, manquait à l'explication de AvWeb. Voici donc des circonstances qui peuvent vous faire rapidement passer dans un autre monde. Comme le disait Monsieur Ledoux, enquêteur au BST, il arrive parfois que "la vie soit vraiment très belle" jusqu'à quelques secondes avant qu'elle ne devienne, on l'espère, éternelle.
L'idée de partager ce texte dans une chronique, c'est aussi parce que c'est un sujet sur lequel ma propre formation était défaillante. Depuis que j'en ai pris conscience, j'ai réalisé que bien d'autres pilotes n'en saisissaient pas tous les risques. En fait, bien des instructeurs aussi (Même une organisation très très très crédible est complètement perdue dans ses explications - j'en fait le sujet d'un quiz dans une petite chronique dans quelques jours). Évidemment, on peut dire que si vous respectez toujours parfaitement toutes les consignes qu'on vous a inculquées pendant votre formation, vous n'aurez pas de problème. Selon moi, c'est nettement insuffisant : À moins d'avoir été spécifiquement prévenus sur les circonstances favorables au piège, les consignes ne sont tout simplement pas suffisantes. Le piège est vraiment trop accessible à une complaisance qui peut très bien ne pas être reconnue comme telle.
Dernière mention avant d'entrer dans le vif du sujet : Comme Louis le supposait dans le fil sur les Hélios, les circonstances de ce virage sont très proches (mais pas identiques) à celles du "Moose Stall", qu'on pourrait aussi traduire au Québec par "le décrochage du béluga", ou encore, "le décrochage du rorqual commun" ou même, par "le décrochage du cachalot". Je vais garder la dénomination du Moose Stall puisqu'elle existe déjà et même si vous retrouvez ici des explications apparentées à celles du Moose Stall (pas toutes), je compte en faire le sujet d'une chronique distincte, aussi pour lui faire de la pub : Ce décrochage, je crois que c'est deux pilotes que je connaissais qu'il a emporté. Louis en connais aussi et comme il le faisait remarquer, ce sont souvent des pilotes très expérimentés qui en sont victimes. Je vous promet aussi une petite chronique sur le décrochage asymétrique parce que finalement, on lit vraiment n'importe quoi...
C'est ici que ça commence : Virage de base en finale - le Piège
1) Un bon vent dans le dos en étape de base peut vous donner l'impression que vous allez vite par rapport au sol et vous amener à réduire votre vitesse air (si vous ne regardez pas votre anémomètre qui vous indique justement cette vitesse)
J'en profite pour ouvrir une autre parenthèse pour mettre en garde ceux qui voudraient atterrir en avion avec la vitesse GPS pour indicateur de vitesse (vitesse sol) - c'est courir au suicide... Posez la question si vous n'êtes pas sûr de savoir pourquoi... (et ça vaut même si vous lisez la vitesse sur le simili anémomètre du tableau de bord de votre GPS Garmin ! ).
2) Comme la vitesse sol va être plus élevée à cause du vent dans le dos (si vous avez conservé une "vitesse air" adéquate), l'étape de base passe plus vite : C'est facile de dépasser l'axe de piste.
3) En fin de base, on est déjà moins haut qu'en début de base. Si on ne regarde pas assez son anémomètre qui indique la vitesse de l'avion dans les airs, l'illusion de vitesse au sol devient encore plus importante, ce qui peut porter un pilote pas attentif à laisser sa "vitesse air" diminuer encore.
Ici, il faut rappeler qu'une diminution de la vitesse implique une augmentation de l'angle d'attaque : C'est facile à visualiser : un avion qui vole lentement s'enfonce dans la masse d'air : Le vent relatif va venir de "plus bas" par rapport à un avion en croisière et qui va voir un vent relatif presque parallèle avec la corde de l'aile. En ralentissant, l'angle d'attaque augmente (et un angle d'attaque qui augmente, c'est un angle d'attaque qui se rapproche de l'angle de décrochage...)
4) Le pilote s'apprête à faire un virage. On sait qu'en virage, la vitesse de l'aile intérieure diminue, ce qui implique une augmentation de l'angle d'attaque pour l'aile à l'intérieur du virage (plus de détails à venir dans la chronique sur les décrochages asymétriques).
5) Comme le pilote se trouve déjà bas pour entreprendre un virage à grande inclinaison qui pourrait être requis pour rejoindre l'axe de la piste, il peut être tenté de "tricher", de forcer le virage avec le palonnier. Ceci va ralentir encore davantage l'aile à l'intérieur du virage et donc augmenter encore l'angle d'attaque sur cette aile. Si l'aile intérieure n'est pas encore décrochée, ces augmentations successives de l'angle d'attaque sur cette aile se rapprochent dangereusement de l'angle de décrochage. Pendant ce temps, même si l'angle d'attaque du vent relatif se rapprochait aussi tranquillement de l'angle de décrochage de l'aile extérieure, ce mouvement de palonnier vers l'intérieur va accélérer l'aile extérieur et donc, réduire l'angle d'attaque sur cette aile (l'éloignant d'une situation de décrochage).
6) Ce mouvement de palonnier pour forcer le virage, si il ne s'accompagne pas d'un mouvement d'ailerons correspondant, ça fait un dérapage. Le pilote ne voudra pas suivre avec l'aileron parce qu'il va avoir peur de faire un virage à grande inclinaison à faible altitude. Bon, à ce stade, l'aile gauche vient de ralentir alors que l'aile droite vient d'accélérer (réduction de l'angle d'attaque sur l'aile extérieure (droite) mais c'est un changement de vitesse dans une période relativement courte (le temps du mouvement de palonnier). Ce relativement bref mouvement peut déjà être fatal mais si il ne l'est pas, le pilote peut encore très facilement se mettre dans une situation contrariante.
7) Ici, l'avion, si il n'est pas déjà en contact avec le sol, est établit dans un virage. Le virage n'est pas coordonné mais, au delà du mouvement de lacet induit pas le palonnier, l'avion va tout de même continuer à virer vers la finale. En virage donc, l'aile intérieure va moins vite que l'aile extérieure, ce qui continue à maintenir un angle d'attaque plus important sur l'aile intérieure que sur l'aile extérieure.
8) Au delà de la vitesse plus basse de l'aile intérieure (gauche) et de la vitesse plus élevée de l'aile extérieure (droite), le mouvement latéral de l'avion associé au dérapage va lui-même favoriser une augmentation de la portance sur l'aile extérieure (la plus exposée au vent dans cette situation de dérapage).
9) Virage légèrement ou fortement dérapé mais en virage tout de même et l'avion va être incliné dans le sens du virage (même si il n'est pas suffisamment incliné pour produire un virage coordonné). À partir du moment où l'avion est en virage, on augmente le facteur de charge. Augmenter le facteur de charge, ça se traduit par une augmentation de l'angle d'attaque sur les ailes. Vous voyez bien qu'on aide pas notre cas mais bon, je crois qu'on peut dire que c'est intrinsèque aux virages (à moins de faire des virages en g négatifs mais là, je ne connais rien à la voltige).
10) Comme on vient de ralentir l'aile gauche, elle perd de la portance pendant que l'aile droite en gagne. L'aile gauche peut s'affaisser (si elle ne décroche pas carrément). L'aile droite (extérieure) peut aussi monter du fait la portance supplémentaire induite par cette accélération ou de la vitesse plus élevée issue de l'accélération et aussi, du mouvement de dérapage latéral vers l'extérieur du virage qui l'expose à un plus grand écoulement d'air (je suis persuadé qu'en plus, un dérapage pour nos avions dépourvus de winglets doit généralement entraîner une réduction de la turbulence de sillage au bout de l'aile extérieure et donc, une plus grande portance).
11) Pour compenser ce léger affaissement de l'aile gauche (l'aile à l'intérieur du virage) ou soulèvement de l'aile droite (l'aile à l'extérieur du virage), le pilote peut être tenté de donner de l'aileron à droite pour éviter de laisser l'avion s'incliner (Si il n'a pas déjà fait décroché son aile intérieure au virage avec le mouvement du palonnier). Il peut aussi être tenter de tirer un peu sur le manche face à cet affaissement intempestif.
12) En donnant du palonnier à droite, il abaisse l'aileron gauche et augmente ainsi l'angle d'attaque. En même temps, il RELÈVE l'aileron droit et réduit l'angle d'attaque de l'aile droite qui va s'en trouvée encore mieux accrochée. Si il tire sur le manche, il augmente encore plus l'angle d'attaque.
En fait, là, tout est déjà joué : Ce dernier coup d'aileron, c'est le coup de grâce. Presque tous les facteurs concordent pour faire décrocher l'aile gauche tout en favorisant le ré-accrochage de l'aile droite. L'avion peut très brutalement s'incliner, voir même se retourner, avec vraiment très peu d'espoir de le remettre à l'endroit, surtout avec l'effet de surprise de voir cette aile intérieure se dérober brutalement à 500 pieds du sol.
Bon, une autre petite nuance : Si on vire en glissade et qu'on tire assez fort, c'est l'aile extérieure qui va décrocher. Ça, c'est beaucoup moins grave parce que si ça ce produit, ce décrochage de l'aile extérieur va naturellement amener l'avion à sortir du virage - les ailes vont revenir naturellement à l'horizontal. Ça laisse du temps pour réagir, pour soulager le manche tout en ramenant les ailerons au neutre, pour faire une remise des gaz au besoin. Il faut toutefois réagir parce qu'autrement, le décrochage de l'aile extérieure (haute) peut se poursuivre au delà de la situation horizontale dans laquelle son décrochage l'aura d'abord ramenée. Le dérapage ne laisse aucune de ces chances.
Ma recommandation : Si vous n'êtes pas à l'aise dans les glissades, qu'elles soient vers l'avant ou en virage, faites vous aider par un instructeur. C'est la partie la plus le fun du pilotage. Si vous tenez absolument à pratiquer des glissades seuls sans en avoir l'habitude, rappelez vous toujours d'abaisser le nez et de garder de la vitesse et de l'altitude : En glissade, le fuselage est mis en travers de l'écoulement de l'air. Sur bien des avions, ça a l'effet d'un frein vraiment efficace (et c'est pour ça que c'est utile pour perdre de l'altitude rapidement). Un des objectifs de la glissade, c'est de vous permettre de perdre de l'altitude. Ça permet aussi d'atterrir vent de travers avec doigté, et de rejoindre avec précision l'axe de la piste si vous êtes un peu décalé (accessoirement, ça permet aussi de ralentir au dessus de la piste avant le toucher des roues mais là, c'est un peu "agressif" comme pilotage...).
Pierre, qui remercie tous ceux qui ont contribué, et tous ceux qui vont encore contribuer à cette compréhension.
Merci d'enrichir ce texte de vos commentaires (ou de vos questions). Il m'arrive de dire des niaiseries et je n'en fait pas de complexes. La confrontation des idées, ça les enrichies, ça les rends plus fortes et ça favorise la compréhension de chacun. Aussi, assurez-vous de comprendre, pas seulement d'enregistrer une consigne. Je ne suis pas instructeur (pas encore en tout cas). Ce texte, c'est une plate-forme pour comprendre.
Une importante mise en garde : Cette séquence, ça ne représente pas une chaîne d’événements où tous les éléments sont requis pour entraîner un accident. Il peut manquer plusieurs éléments (dont le coup de grâce avec les ailerons) et le résultat peut être tout aussi contrariant (moins probable mais tout aussi contrariant). Par contre, si tous les éléments sont là, vous êtes à peu près sûr d'avoir déjà un pied dans le vol gratuit à perpétuité.

